Une déclaration des coprésidentes de la CSU2030 à l'occasion de...
9 mars 2023
Cet article a été initialement publié dans le British Medical Journal le 9 mars 2023
Auteurs : Helen Clark, Phumzile Mlambo-Ngcuka, María Fernanda Espinosa Garcés, Gabriela Cuevas Barron.
Les progrès vers l’égalité des genres sont excessivement lents – selon un récent rapport des Nations Unies, il faudra 300 ans pour l’atteindre.1
Dans un monde où les crises sont multiples, nous trouvons surprenant que l’égalité des genres ne soit pas une priorité pour la plupart des dirigeants politiques. De plus en plus de données attestent que la santé et la résilience de nos communautés et de nos économies dépendent de la participation des femmes à la prise de décisions.
La pandémie de covid-19 a également exacerbé les inégalités liées au genre. Elle a révélé d’immenses vulnérabilités qui ne peuvent être résolues que si les gouvernements reconnaissent et renforcent les structures qui soutiennent les femmes et les filles, et investissent dans celles-ci. On peut supposer que cette reconnaissance, ce renforcement et cet investissement ne se concrétiseront pas tant que nous n’aurons pas plus de femmes aux postes de direction.
Pendant la pandémie, les femmes de tous les secteurs ont quitté le marché du travail, car elles ont subi les conséquences liées aux rôles traditionnels de genre, aux responsabilités qui leur incombent en matière de soins, aux structures salariales discriminatoires à leur égard, à des conditions de travail dangereuses et à l’absence de protection sociale. Pour les filles, les fermetures d’écoles et d’autres pressions exercées ont exacerbé les risques, tels que les problèmes de santé mentale, la violence, le mariage des enfants, la grossesse, les mutilations génitales féminines et l’infection par le VIH. Des millions de femmes et de jeunes filles se sont retrouvées sans accès aux services de santé sexuelle et reproductive. Le nombre de filles et de jeunes femmes qui risquaient de ne pas retourner à l’école a été évalué à 11,2 millions.2
Un grand nombre d’agents de santé, en particulier, ont quitté leur emploi. Dans plus de 70 % des cas, ces emplois étaient occupés par des femmes, dont beaucoup sont insuffisamment ou non payées, sont surchargées de travail ou occupent des emplois précaires.
Les nombreuses pressions dues aux conflits et au changement climatique aggravent encore la pauvreté et les inégalités entre les genres, notamment en raison de la hausse du coût de l’énergie et de la vie, et de l’inflation.3 L’augmentation des paiements directs à effectuer par le patient pour les services essentiels oblige également de nombreuses familles à choisir entre l’accès aux services de santé essentiels et l’eau potable et la nourriture. Dans certains pays, les droits humains les plus fondamentaux des femmes et des filles sont niés, comme le droit à l’éducation.
En tant que dirigeants de réseaux et de partenariats multipartites qui œuvrent pour faire de l’égalité des genres et de la santé pour tous une réalité, nous appelons les chefs d’État et de gouvernement à considérer ce programme comme prioritaire et à en assurer le financement chaque fois qu’ils se réunissent. Ils ont de nombreuses occasions de le faire cette année, notamment lors du G7 et du G20, des réunions des institutions financières internationales, des dialogues régionaux sur le leadership, et avec l’ensemble des États Membres des Nations Unies, y compris lors du Sommet sur les objectifs de développement durable (ODD) et des réunions de haut niveau de l’Assemblée générale des Nations Unies sur la santé qui se tiendront cette année.
Pour amorcer le changement, nous proposons un plan en quatre points :
Premièrement, veiller à ce qu’un plus grand nombre de femmes occupent des postes de direction et de prise de décision dans les secteurs public et privé et s’engager en faveur de la parité femmes-hommes d’ici à 2030. Les femmes devraient être représentées à tous les niveaux, occuper les postes de présidente, directrice générale ou directrice, siéger aux conseils d’administration et assurer des fonctions de gestionnaires, et détenir les portefeuilles de ministères importants tels que les finances et les affaires étrangères. Elles doivent également être soutenues pour assumer ces rôles exigeants dans la durée.
Deuxièmement, assurer une protection financière afin de réduire au minimum le paiement direct des soins de santé par les patients afin que chacun puisse accéder aux services dont il ou elle a besoin. Faire progresser la couverture sanitaire universelle, afin que chacun, partout dans le monde, puisse accéder à des services de santé de qualité, y compris des services complets de santé sexuelle et reproductive, sans risque de difficultés financières.
Troisièmement, les femmes constituant la majeure partie du personnel de santé et d’aide à la personne, assurer l’équité entre les genres parmi les dirigeants, s’attaquer au travail sous-payé et non rémunéré en instaurant une rémunération adéquate, combler l’écart de rémunération entre les femmes et les hommes, et investir dans un travail sans risque et décent. Offrir des possibilités de formation et des environnements exempts de violence et de discrimination pour tous les agents de santé. Cela est bénéfique pour la qualité des soins et la résilience des systèmes de santé, ce qui nous rend tous moins vulnérables face aux situations d’urgence.
Quatrièmement, nous devons collecter et analyser des données ventilées par sexe et par genre, et pratiquer la budgétisation fondée sur le genre, afin de garantir des politiques de transformation tenant compte des questions de genre qui ne laissent personne de côté.
Il est impératif qu’à l’occasion de la Journée internationale de la femme mais aussi lors des 364 autres jours de l’année, les dirigeants mondiaux portent leur attention sur les femmes et les filles. Tout le monde en profitera.
Veuillez trouver la publication originale du BMJ ici : https://www.bmj.com/content/380/bmj.p567.
Références bibliographiques
- Without investment, gender equality will take nearly 300 years: UN report, https://news.un.org/en/story/2022/09/1126171.
- Barron GC, Laryea-Adjei G, Vike-Freiberga V, et al., Lancet Commission on COVID-19: Task Force on Humanitarian Relief, Social Protection and Vulnerable Groups. Safeguarding people living in vulnerable conditions in the COVID-19 era through universal health coverage and social protection. Lancet Public Health 2022;7:e86-92. doi:10.1016/S2468-2667(21)00235 8. pmid:34906331
- Fonds monétaire international. Perspectives de l’économie mondiale. https://www.imf.org/fr/Publications/WEO
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